Vous souvenez vous d’Odette (voir chronique « visto de naz ») ? Le jeune chef italien Marco, venu suivre des cours de canard auprès d’elle, lui avait promis en retour un séjour dans le château de son « boss ». Je reconnais ne pas avoir cru à cette invitation même si je ne doutais pas de la bonne foie de Marco. Le boss, mon ami, a pourtant tenu parole et voilà notre Odette quittant Cambes pour la capitale, cap sur la région reculée du Yorkshire, aux confins de l’Ecosse. 26 ans qu’Odette n’avait pas pris l’avion : « c’est plus rassurant qu’autrefois » nous confia-t-elle une fois arrivée à Londres. Arrivée ? Il lui fallut encore prendre un train jusqu’à York où une voiture l’attendait pour l’emmener « au castel ». Sans compter qu’Odette voyageait avec son meilleur ami : un canard gras de plus de 5 kg pour assurer un diner monothématique. Imaginez l’équipée ! Ces trois jours de chasse dans l’un des plus élégants châteaux d’Angleterre resteront un souvenir sans égal. Odette passait de la monumentale salle à manger aux cuisines du château où elle échangeait des tours de mains avec les chefs Melvin et Marco, respectivement responsables des spécialités anglaises et internationales. Sans perdre le nord, notre Odette se préparait tranquillement pour assurer le dîner clé du séjour. A 20 h 30, tout était en boîte et nous prenions place à une table longue comme une stretch limo, décorée de feuilles d’automne et de faisans empaillés ( !). Je ne crois pas me tromper en vous disant qu’elle passa l’un des plus émouvants et des plus joyeux moments de sa vie. Elle reçu tous les honneurs des invités : ducs, princes et princesses, jeunes filles de - très - bonne famille, journalistes internationaux... pas un qui ne la questionna sur son voyage au long « cou », son Quercy natal ou encore sa recette de foie en gelée (l’une des plus fameuses spécialités d’Odette dont vous trouverez la recette dans mon livre sur le canard).
Introduction au diner « tout canard », celui-ci fut littéralement englouti au point que l’intendant de la maison vint vers elle après le repas pour lui confier que c’était la première fois qu’un plat était sifflé aussi vite. Le propriétaire d’une célèbre chaîne d’hôtels asiatiques demanda même à ce qu’on lui serve une saucière entière de gelée. Quel succès ! Le reste du menu laisse rêveur : foie gras poêlé et sauce au Sauternes, magret en chemise, faisans farci au perdreau et au foie gras, arrosé de château Yquem et de Mouton Rothschild. Un véritable festin inauguré par un champagne Dom Pérignon 1990 qui permit à Odette de récupérer tout un tas de capsules de bouchons pour la collection de son neveu. L’ambiance battait son plein. Le diner fut somptueux, le discours de notre hôte qui fit lever les verres en l’honneur d’Odette et de son incroyable voyage canard au bras manqua de m’arracher quelques lames. La soirée se poursuivie dans la bibliothèque ou Odette dansa avec un prince sans couronne mais pas sans humour. Vers 3 heures du matin, elle nous annonça qu’elle rentrait dans « ses appartements ». Odette était décidemment la reine du château !