Les coings

L’automne tire à sa fin et je suis sûre que vous n’avez même pas fait le plein de coings, ce fruit du cognassier, semblable à une poire, qui se conserve très longtemps et embaume la maison avant même d’avoir été cuisiné. Si nos grands-mères le maniaient avec aisance, nous restons souvent un peu coincés devant la bête. Il serait dommage de ne pas profiter des dernières récoltes pour préparer de délicieuses compotes, gelées ou pâtes de fruits.

 

A la suite de mon pèlerinage trimestriel chez mon papa, sur l’île de Ré, je suis revenue à Paris les bagages chargés de coings de son verger, prête à me confronter à la cuisine d’un fruit auquel je ne m’étais jamais frottée. Car le coing ne se croque pas à la volée, comme une pomme ou une poire. Il est, au contraire, l’un des rares fruits à ne pouvoir être consommé cru.

 

Des recettes ? Je m’y suis collée façon stage intensif et ai fait subir à mon fiancé une dégustation en forme de déclinaison, lui infligeant chaque jour le produit de mes élucubrations obsessionnelles. Contre toute attente, ce fut l’occasion de me découvrir un vrai penchant pour ce fruit oublié. Une petite note acidulée, une astringence fruitée, une texture modulable à l’envi, pouvant aller du ferme au fondant selon le degré de cuisson, sans compter l’incroyable légèreté en sucre et en calories : comment résister ? Reste tout de même que le coing est un anti-laxatif reconnu, mieux vaut donc rester modéré sur les quantités.

 

Je vous livre le fruit de mes expériences, à chaud : passée experte en l’art de détourner les classiques, je me piquai de remplacer les pommes de la célèbre tarte des demoiselles Tatin par des coings, en y ajoutant une poignée d’amandes effilées. Tout simplement cuits dans le moule, avec un fond de caramel aromatisé à l’amaretto, les coings se recouvrent ensuite d’une abaisse de pâte feuilletée avant de passer 30 minutes dans un four chaud. Je mets au défi quiconque de regretter la version originelle !

 

J’ai testé aussi la version braisée, pour accompagner les gibiers ou les volailles. Recette toute bête : pelez-le, coupez-le en quartiers et poêlez-le au beurre avec une larme de sirop d’érable et un nuage de cannelle en poudre. Servi avec une cuisse de poulet au vinaigre ou un confit de canard croustillant, voilà bien un repas de fête à moindre coût. Enfin, j’ai imaginé un crumble pour le moins automnal : moitié pommes, moitié coings. Je vous en livre la recette sans oublier le moindre détail :

Crumble pommes-coings

pour 8 personnes

Ingrédients :

  • 2 ou 3 coings (700 g environ)
  • 2 grosses pommes (600 g environ)
  • 3 sachets de sucre vanillé
  • 150 g de farine
  • 90 g de sucre vergeoise blonde
  • 100 g de beurre 1/2 sel
  • 30 g de spéculoos (facultatif)

Préchauffez le four à 200°C (th.6-7). Pelez et épépinez les coings, coupez-les en 8 morceaux et mettez-les dans une grande casserole, ajoutez un peu d’eau, le sucre vanillé et couvrez. Laissez compoter 10 minutes. Pendant ce temps, pelez et épépinez les pommes, coupez-les en 8 également et ajoutez-les aux coings. Retirez le couvercle et laissez compoter encore 10 minutes.

 

Mélangez la vergeoise, la farine et les spéculoos grossièrement brisés. Ajoutez le beurre ramolli et coupé en petites parcelles et mélangez du bout des doigts pour obtenir une sorte de sable.

 

Etalez les fruits dans un grand moule beurré, lissez bien la surface et couvrez de pâte. Enfournez et laissez cuire 25 minutes.

 

Pas moyen d’arriver à bout de mon incroyable stock de coings. J’essayai de pocher mes coings comme ma grand-mère le faisait avec des poires, en comptant quelques minutes de cuisson supplémentaires : plongés dans un sirop composé d’eau et de sirop d’orgeat (environ 60%-40%) auquel j’ajoute - pour la note de fraîcheur - une feuille de laurier et quelques baies de genièvre. Je laisse mijoter 35 minutes avant de servir tiède ou froid, arrosé d’un peu de sirop bien sûr !

 

Enfin, la dernière de mes expériences fut sans doute la plus insolite. Vous souvenez-vous de cette poire diablement télégénique, dont la blancheur venait à disparaître sous nos yeux sous une coulée de chocolat d’une voluptueuse opacité ? Pour reproduire ce sensuel souvenir, je décidai de pocher des quartiers de coings, préalablement débarrassés de leur peau et de leurs pépins, avant de les couvrir d’une sauce chocolat aux accents de réglisse... et tout cela sans réglisse et presque sans matière grasse ! Ma sauce n’étant composée que d’eau, de cassonade cuivrée (un sucre très peu raffiné au fort goût de réglisse) et de chocolat très amer.

 

Les coings noirs

  • 1 coing de 600 g environ
  • 4 sablés bretons
  • 250 g de cassonade cuivrée
  • 30 cl d’eau
  • 50 g de chocolat à 70%

Pelez et épépinez le coing, coupez-le en 4 et plongez-le dans une casserole contenant l’eau et la cassonade. Portez à ébullition et laissez cuire à petits bouillons 20 minutes. Egouttez le coing et réservez-le.

 

Prélevez 10 cl de sirop de cuisson brûlant et jetez-y le chocolat cassé en petits morceaux. Remuez jusqu’à ce qu’il soit bien fondu.

 

Dans les assiettes, émiettez les 4 sablés, coupez les quartiers de coings en deux dans la longueur et déposez-les sur la poudre de sablé, puis entourez du chocolat fondu.

 

Servez sans attendre.