De retour d’un séjour dans l’Aude pour le tournage des carnets grand format en pays Cathare, je m’étais juré de me lancer dans la préparation d’un cassoulet, recette emblématique de la région, oh combien discutée ! J’ai donc rapporté une cassole, le récipient traditionnel, réalisé par la poterie Not, entreprise du patrimoine vivant plus que centenaire. Si j’ai osé bousculer un peu la recette, un cassoulet n’est pas envisageable sans cassole !
La recette, justement, fait l’objet d’âpres querelles de clocher. Entre la version de Carcassonne, de Castelnaudary et de Toulouse, on frôle la guerre de religion... Quoi qu’il en soit, ce plat, autrefois préparé avec des fèves avant que les haricots ne débarquent sur notre continent, met tout le monde d’accord sur un point: ce qui fait le cassoulet c’est le haricot ! Mais là aussi, la controverse s’échauffe: lingots du Lauragais, cocos de Pamiers, Tarbais…? Pour trancher sans favoriser personne, j’ai opté pour des haricots rapportés d’un tournage dans le Pas de Calais: des lingots du Nord, parfaits ! Au sujet des viandes, les polémiques vont bon train également: si la saucisse de Toulouse réunit à peu près tout le monde, certains optent pour du confit de canard, voire de perdreau, d’autre de l’agneau. Là aussi, quitte à faire frémir dans les chaumières audoises, j’ai osé un parti pris fort: pas de couennes ! D’abord parce que mon boucher n’en avait pas vendu depuis l’après-guerre (ah, les boucheries parisiennes, un monde à part !) et surtout parce que l’odeur de la couenne mijotée me retourne le cœur. Donc pas de couennes, pourtant considérées comme indispensables pour lier la sauce et donner du gout. Qu’a cela ne tienne, un jarret de porc (naturellement entouré de couenne) et un pied de veau remplaceront avantageusement la peau de cochon. Pour le reste, je suis restée classique: travers de porc, échine et confit de canard. Bref, un cassoulet à ma façon, syncrétique, fruit de la lecture d’une bonne vingtaine de recettes différentes. Et bien, il faut croire que les dieux du cassoulet étaient avec moi ce jour-là, il était excellent ! D’autant que j’avais pris la précaution de le cuisiner la veille. Seul hic: le confit, qui dépassait avantageusement du plat, avait été mangé la veille, trop tentant, du coup, il n’est plus sur la photo ! C’est l’avantage de ce plat, pour le moins rural: s’il est long à préparer, on peut en manger 3 jours de suite. Et je ne me suis pas privée. Heureusement que je n’avais pas accumulé trop de kilos pendant ma grossesse car le régime cassoulet n’est pas la méthode la plus efficace pour s’en débarrasser. Allez, trêve de discussion, voici ma recette….</>
Cassoulet à ma façon
Pour 6 personnes
Ingrédients :
- 500 g de haricots lingots (si possible français, du Nord ou du Lauragais )
- 700 g de travers de porc
- 200 g d’échine
- 500 g de saucisses de Toulouse
- 2 cuisses de canard confites
- 1 jarret de porc demi sel
- 60 g de jambon sec
- 100 g de lard gras (j’utilise du lard de Bigorre)
- 1 pied de veau coupé en morceaux
- 10 grains de poivre
- 4 clous de girofle
- 1 bouquet garni
- 1 carotte
- 3 gros oignons
- 1/2 tête d’ail
- 1 CS rase de gros sel + 1 CC de sel fin
- si possible: un os de jambon ou os de porc frais
Couvrez les haricots d’eau fraiche.
Dans un autre récipient, couvrez le jarret d’eau également.
Laissez reposer au frais 7 h pour les haricots et 3 h pour le jarret (cela dépend de la salinité de votre jarret, renseignez-vous auprès de votre boucher). Changez l’eau des haricots 1 ou 2 fois (pour éviter tout risque de fermentation).
Egouttez et rincez le jarret, placez-le dans une grande cocotte, ajoutez les morceaux de pieds de veau, le lard coupé en 4, 1 oignon pelé et piqué de clous de girofle, la carotte pelée et coupée en rondelles, le sel et les os de jambon. Couvrez d’eau froide à hauteur, portez à ébullition. Écumez la mousse. Quand la mousse disparait, ajoutez le poivre et le bouquet garni. Laissez cuire 1 h 30 à frémissement et à couvert.
Filtrez le bouillon, récupérez le jarret et coupez la viande en gros morceaux. Jetez tout le reste. Coupez les travers entre chaque os, coupez l’échine en morceaux et les saucisses en tronçons de 10 cm. Hachez très finement le jambon au couteau.Faites dorer les cuisses de canard dans une grande poêle, côté peau. Quand elles sont bien dorées, égouttez-les. Dans la graisse restante, mettez les travers, l’échine et les saucisses à dorer à feu assez vif (procédez en plusieurs fois pour éviter l’effet d’ébullition).
Pelez et coupez 2 oignons grossièrement, pelez et dégermez les gousses d’ail. Hachez le tout jusqu’à l’obtention d’une purée au mixeur.
Remplacez les viandes par ce hachis et laissez fondre 10 minutes environ en couvrant de temps en temps, ajoutez le hachis de jambon en fin de cuisson.
Egouttez et rincez les haricots. Versez-les dans une casserole, couvrez d’eau froide et portez à frémissement. Laissez cuire 5 minutes puis égouttez (ceci permet de limiter les problèmes de digestion!).
Versez les haricots dans la cocotte, couvrez avec le bouillon et laissez cuire jusqu’à ce qu’ils soient cuits mais encore fermes (1 h environ). Égouttez les haricots en gardant le bouillon, mélangez-les au hachis d’oignon, ajoutez 2 louches de bouillon et 1 cuillère à café rase de sel fin.
Préchauffez le four à 170°C chaleur tournante.
Dans un récipient en terre creux et évasé (la cassole traditionnelle idéalement), alternez couches de viandes (échine, jarret et travers) et haricots. Arrosez de bouillon à hauteur. Enfoncez les saucisses à la fin en les laissant légèrement dépasser. Réservez les confits. Enfournez et laissez cuire 2 à 3 h. Rajoutez un peu de bouillon en cours de cuisson si vous voyez que le cassoulet se dessèche. Dès qu’une croute se forme, enfoncez la surface à l’intérieur. La tradition veut qu’on effectue cette opération rituelle 7 fois mais 3 ou 4 fois suffiront largement. Le cassoulet est encore meilleur réchauffé. Dans ce cas, rajoutez un peu de bouillon et comptez 2 h de réchauffage à 160°.
Les conseils de Julie
J’utilise du jarret demi-sel mais s’il est frais, inutile de le faire dessaler.
Vous pouvez ajouter 2 brins de sauge dans le bouillon de cuisson des haricots.
Après avoir poêlé les cuisses de canard, je les passe, côté peau sur le dessus, sous le grill du four pour qu’elles soient bien dorées.
Le bouillon est volontairement peu salé.